Il est resté droit dans ses bottes, refusant tout dialogue avec les indépendantistes qui, malgré l’emprisonnement ou l’exil de leurs leaders, ont remporté les élections qu’il avait provoquées.
Il disait avoir décapité la rébellion, il avait pris le pouvoir administratif, judiciaire et même audiovisuel ( TV3 s’est vue interdire la retransmission de l’impressionnante manifestation de plus de 50 000 nationalistes catalans tous drapeaux déployés sur les places de Bruxelles) et voilà qu’il a subi une défaite historique, une authentique débâcle : 4,7 % des voix, 4 députés sur 135…
Dans n’importe quel pays démocratique un tel désaveu obligerait à la démission immédiate.
Mais le Royaume d’Espagne est-il une monarchie démocratique ?
Depuis plusieurs mois le doute s’est installé et aujourd’hui la question devient incontournable.
L’entêtement à ne pas prendre la mesure de la revendication séparatiste catalane, le refus de tout dialogue avec des élus légitimes qui ne faisaient qu’appliquer pacifiquement le programme pour lequel ils avaient été élus a pour résultat une marche mortifère vers une crise sans précédent du royaume, crise identitaire, morale, politique et économique.
Qui peut arrêter cet affrontement suicidaire ?
L’Europe ? Elle pourrait, elle devrait mais elle refuse toute initiative qui pourrait être interprétée comme une ingérence dans les affaires internes d’un Etat souverain. En d’autres temps elle avait applaudi au démantèlement de la Tchécoslovaquie ou de la Yougoslavie voire de la Serbie… Aujourd’hui elle condamne les manquements aux principes démocratiques en Pologne et en Hongrie. Mais sur la question catalane elle a fermé les yeux devant les violences dans les bureaux de vote du 1er octobre et maintenant elle dit, par la voix du Président de la Commission, « qu’elle ne changera pas de position » malgré un vote incontestable (taux de participation : 82% ) et où les indépendantistes recueillent 47,6 % des voix contre 43,3 % aux unionistes ( et 10 % à Podemos qui réclame un référendum ). C’est une attitude irresponsable qui affaiblit la parole de l’Europe.
Seule Angela Merkel a eu le courage d’appeler au dialogue… Et notre Président pourtant très actif à l’international se tait, refuse de s’intéresser à ce qui se passe au Sud des Pyrénées…
Pourtant la crise catalane et espagnole concerne l’Europe, ses valeurs, sa cohésion et son économie… Elle révèle en tous cas la difficulté et même l’incapacité des Etats-nation et de l’Europe a gérer la montée des revendications identitaires : le fédéralisme a fait la force des Etats Unis et il est à l’ordre du jour un peu partout en Europe, et en Espagne plus qu’ailleurs.
Qui peut arrêter ce désastre, ce vertige mortifère qui saisit l’Espagne ?
Pour que des voix nouvelles se fassent entendre et permettent d’ouvrir un chemin, il faut d’abord la démission de celui qui par son manque total d’intelligence politique a conduit l’Espagne au bord de l’explosion : la démission de Mariano Rajoy est aujourd’hui incontournable.
C’est un préalable pour que s’ouvre un dialogue ; il faudra également pour qu’il y ait dialogue que les leaders indépendantistes soient libres !
Le roi d’Espagne doit comprendre que « pour que tout continue, il faut d’abord que tout change ».
Avant qu’il ne soit trop tard…