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«SI al dret de dír» ! OUI à la tenue d’un référendum !

Les résultats des élections au Parlement de la Généralitat de Catalogne ont été largement commentés et chaque camp de crier victoire ! 

Essayons une analyse moins passionnelle avant de tirer une conclusion pour le futur.

Tout d’abord le taux IMG_3877de participation, très élevé, 4 électeurs sur 5 ont pris part au vote, rappelle une fois de plus la vitalité de la démocratie catalane et la puissance de la mobilisation sur l’enjeu de l’indépendance.
Cela conforte la légitimité des résultats.

Mais de quels résultats parle-t-on ?

La composition du futur gouvernement de Catalogne ?
Junts pel Sí n’a pas obtenu la majorité absolue et devra sans doute constituer un gouvernement minoritaire tant les divergences sont profondes avec la CUP, certes favorable à l’indépendance mais frontalement opposé aux options économiques et sociales d’ Artur Mas.

Le score des anti-indépendantistes ? Spain's PM Rajoy gestures during a news conference at Madrid's Moncloa Palace
Le Président Mariano Rajoy devrait rester modeste car son parti, le PP, est arrivé en 5éme position avec 8,5% des votes ; jamais le PP ne s’était effondré à ce niveau !
Visiblement le soutien médiatisé de Nicolas Sarkosy et d’Angéla Merkel ne lui ont pas porté chance…

En fait il est impossible d’extrapoler des résultats de ce scrutin une indication sur qui des «Oui» ou des «Non» aurait eu la majorité dans un éventuel référendum car tout dépend de la répartition des votes de «Si que es pot» formation qui n’a pas pris position sauf à affirmer la nécessité d’un référendum (Mme Ada Colau, Maire de Barcelone s’est exprimée en faveur de l’indépendance mais d’autres leaders de cette formation à la composition complexe ont exprimé l’avis contraire.).

La seule conclusion claire de ce scrutin, c’est le total des votes en faveur d’un référendum qui est proche de 60% lorsqu’on additionne «Junts pel SI», la «CUP» et «Si que es pot».

Ce résultat est très important et lorsque la passion des uns et des autres sera retombée il sera incontournable comme a été incontournable le référendum sur l’indépendance de l’Écosse dans le royaume de Grande Bretagne.

«El dret de dír», le droit des peuples à s’exprimer est une conquête du 20ème siècle, une conquête que l’Europe démocratique ne pourra pas longtemps contester.
C’est la seule voix pour sortir de la grave crise institutionnelle et politique qui secoue l’Espagne aujourd’hui et tous les européens sont concernés.

Et puisque le Président Mariano Rajoy juge que les indépendantistes ont échoué, pourquoi refuse-il d’organiser dans le Royaume d’Espagne ce que le Royaume de Grande Bretagne a assumé, donnant ainsi un formidable exemple de maturité démocratique à toute l’Europe …

Et l’issue fut plus d’unité et de solidarité.

Le message des peuples d’Espagne

Il y a eu en début d’année le message du peuple grec et voilà qu’il revient, plus fort encore, du Sud des Pyrénées.

« Podemos », forme politique du mouvement des « indignés », a su capter, comme « Syriza » en Grèce, la révolte populaire contre les partis en place, de droite et de gauche, corrompus, soumis à l’orthodoxie comptable des banques centrales, incapables de comprendre les dimensions sociales et politiques de l’économie.

Oui, c’est l’irruption de la misère mais sous une forme pacifique et démocratique.

photo - copieLes peuples d’Espagne et de Grèce ne se sont pas laissés séduire par les sirènes nationalistes et xénophobes, au contraire ils revendiquent le droit à la solidarité et à la fraternité ; ils aiment l’Europe, celle des droits de l’homme, des valeurs de démocratie et de laïcité, pas un mot contre l’Euro, mais ils refusent une Europe qui détruit les forces productives.
En Espagne comme en Grèce les peuples n’ont pas perdu la mémoire : ils se souviennent des régimes dictatoriaux, nationalistes et xénophobes du Caudillo pour les uns, des colonels pour les autres.

En France , par contre, on a oublié le régime de Vichy du Maréchal, celui qui a instauré la peine de mort pour avortement, qui a été complice de l’extermination des juifs, un « détail de l’histoire » comme aime le rappeler l’idéologue du Front National, Jean-Marie Le Pen.
En France une grande partie du peuple qui souffre s’est tournée vers le FN lors des dernières élections et les idées de ce parti ont totalement contaminé la droite extrême de l’UMP qui ose aujourd’hui s’appeler « les Républicains » !

Il est urgent d’entendre, de comprendre et de populariser le message de Podémos ; « sans pouvoir médiatique, économique, nous avons démontré que l’on peut faire les choses autrement et que le rêve et l’espoir peuvent l’emporter …notre unique moyen : l’imagination, la joie, la créativité ».

Oui, Podémos c’est un autre rêve que celui, mortifère, du Front National, un rêve de solidarité, d’honnêteté, de liberté d’expression et de démocratie vivante et enthousiaste !

5568396da60a4Nos élus de droite et d’extrême droite qui sont allés défiler côte à côte, écharpe tricolore au ventre, pour s’opposer au droit à l’égalité pour tous dans l’application des lois républicaines du mariage, nos élus bardés de certitudes et de dogmes, prisonniers de leur addiction au pouvoir, peuvent craindre la montée en puissance de ce désir d’égalité et de fraternité qui a nourri le vote pour Podémos ou Syriza!

Les conséquences de ce séisme électoral en Espagne ( le PP a perdu plus de 30 capitales régionales, Podémos a gagné Barcelone, Madrid, Saragosse, la Corogne, Cadix et sans doute Valence ; il est l’arbitre de l’élection des exécutifs régionaux aux Baléares, en Aragon et en Castille la Manche !) sont imprévisibles mais il y a fort à parier qu’une nouvelle ère de la vie politique espagnole est ouverte et que les partis traditionnels devront se réformer en profondeur s’ils veulent demain encore jouer un rôle.

En Catalogne les dirigeants de Podémos soutiennent l’organisation d’un référendum parce que ce sont des inconditionnels de la démocratie mais ils refuseront une indépendance qui ne serait pas solidaire des régions pauvres de l’Espagne.
Artur Mas et les indépendantistes catalans, certes améliorent leur score (45% contre 38% lors des précédents scrutins) mais ils perdent le navire amiral, Barcelone ; sauront ils comprendre le message de Podémos et éviter le piège nationaliste ?

L’indépendance proposée comme un replis nationaliste n’a pas d’avenir ; à contrario, défendue comme une exigence de démocratie, le droit des peuples à disposer d’eux même, et comprise comme un pas vers une Espagne et une Europe fédérales, l’indépendance de la Catalogne devient le rêve et l’ambition qui peut rassembler au-delà de tous les clivages politiques. 
C’est aussi cela le message de Podémos.